Le texte légal concernant le changement de prénom
Depuis la loi n°2022-301 du 2 mars 2022 entrée en vigueur le 1er juillet 2022, l’article 60 du Code civil concernant le changement de prénom est désormais ainsi rédigé :
Toute personne peut demander à l’officier de l’état civil à changer de prénom. La demande est remise à l’officier de l’état civil du lieu de résidence ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé. S’il s’agit d’un mineur, la demande est remise par son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut également être demandée.
Si l’enfant est âgé de plus de treize ans, son consentement personnel est requis.
La décision de changement de prénom est inscrite sur le registre de l’état civil.
S’il estime que la demande ne revêt pas un intérêt légitime, en particulier lorsqu’elle est contraire à l’intérêt de l’enfant ou aux droits des tiers à voir protéger leur nom de famille, l’officier de l’état civil saisit sans délai le procureur de la République. Il en informe le demandeur. Si le procureur de la République s’oppose à ce changement, le demandeur, ou son représentant légal, peut alors saisir le juge aux affaires familiales.
La procédure à engager
La procédure a été simplifiée, en particulier depuis 2016. Il suffit de remplir un formulaire et d’apporter les justificatifs nécessaires.
Il reste toutefois certain qu’il ne suffit pas de vouloir un changement, un ajout ou une suppression de prénom pour l’obtenir. Il faut encore démontrer un intérêt légitime. Les procureurs de la République seront sans doute rapidement saisis par les officiers d’état civil en cas de difficultés. Mais, il est à craindre que les demandes de changement de prénom ne soient souvent traitées par les procureurs de la République que dans des délais fort longs. Ces délais dépassent souvent plus de 6 mois.
Les officiers d’état civil puis les procureurs continueront très certainement à s’opposer aux demandes qui seront insuffisamment argumentées. Les justiciables insuffisamment avertis seront donc sans doute toujours contraints de saisir le juge aux affaires familiales. Le recours à un avocat sera alors obligatoire.
Un désengorgement des tribunaux
La simplification de la procédure de changement de prénom a incontestablement conduit à un désengorgement des tribunaux, en tout cas des juges aux affaires familiales. Selon les « Références Statistiques Justice » (anciennement annuaire statistique de la justice), les dossiers de changement de prénom représentaient environ 2600 par an entre 2011 et 2016 et ne représentaient plus qu’un centaine de dossiers par an depuis 2017. On peut supposer que les dossiers les plus simples n’arrivent plus jusqu’aux juges aux affaires familiales. Ceux qui sont un peu plus compliqué aggravent probablement encore plus la charge des services civils des parquets. Ceux qui arrivent jusqu’au juge aux affaires familiales sont sans doute les plus complexes.
La procédure de changement de prénom, qui suppose l’existence d’un intérêt légitime, ne doit pas être confondue avec celle de rectification d’état civil, qui suppose l’existence d’une erreur.
Qu’est-ce qu’un intérêt légitime justifiant un ajout, une suppression, un changement ou une inversion de prénom ?
L’intérêt légitime est une notion subjective. Celui qui souhaite un ajout, une suppression ou un changement de prénom considérera toujours qu’il a un intérêt légitime à le souhaiter. Mais il faudra convaincre le juge que tel est bien le cas !
La jurisprudence considère généralement que constitue un intérêt légitime :
- Le souhait de supprimer ou remplacer un prénom ridicule soit par lui-même, soit par son association au nom.
- Le souhait d’ajouter, supprimer ou remplacer un prénom dans un but d’intégration à la communauté nationale
Mais le juge peut estimer dans bien d’autres cas qu’il existe un intérêt légitime : utilisation constante d’un autre prénom que le prénom officiel, répercussions psychologiques importantes d’un prénom qui ne satisfait pas la personne qui le porte, etc.
Pour avoir des chances de succès, il ne suffit pas de demander un changement de prénom : il faut présenter un dossier solidement argumenté. Dans certains cas, il faudra d’une part justifier qu’il y a un intérêt légitime à changer ou supprimer le prénom d’origine, d’autre part que le nouveau prénom ou le prénom modifié ne pose pas lui-même de difficultés : il sera difficile pour un juge d’accepter le changement d’un prénom ridicule si le prénom proposé lui apparaît tout aussi ridicule ou d’accepter un changement de prénom dans un but d’intégration à la communauté nationale si le prénom proposé a une consonance étrangère particulièrement marquée.
Quelle est la procédure ?
La demande d’ajout, de suppression ou de changement de prénom doit désormais être soumise à l’officier de l’état civil du lieu de résidence ou du lieu où l’acte de naissance a été dressé.
Le cas des personnes nées à l’étranger
Pour les personnes nées à l’étranger, un doute existe à ce jour à la lecture de l’article 60 du Code civil sur les officiers d’état civil compétents. En effet :
- l’acte de naissance peut avoir été dressé par des autorités étrangères et avoir été transcrit selon les pays auprès du consulat de France territorialement compétent ou auprès du Service central d’état civil (SCEC) situé à Nantes et plus particulièrement du Bureau des transcriptions pour le Maghreb ;
- la naissance peut également avoir été à la fois déclarée auprès des autorités étrangères et du Consulat de France territorialement compétent, auquel cas il est difficile d’admettre en prenant le texte à la lettre que l’acte a été dressé à Nantes même si le Service central d’état civil (SCEC) en détiendra une copie : les actes de naissance sont en effet le plus souvent dressés par les autorités étrangères avant d’être transcrits par les consulats dans la plupart des cas
- Même si la compétence de Nantes est admise, il n’y a pas un, mais plusieurs officiers d’état civil à Nantes : la mairie de Nantes a des officiers d’état civil, mais le Service central d’état civil (SCEC) également. Auront-ils une compétence alternative ?
Pour les personnes résidant à l’étranger, on peut supposer que les officiers d’état civil compétents pour un changement de prénom (au sens large) seront ceux des consulats dont dépendent les intéressés et qu’ils auront à saisir le procureur de la République de Nantes en cas de difficultés, auquel cas le juge aux affaires familiales (JAF) de Nantes sera compétent en cas de refus de changement.
Des décrets, arrêtés ou circulaires viendront certainement apporter des précisions à chacun.
La demande de changement de prénom est une procédure dite gracieuse
Une demande d’ajout, de suppression, de changement ou d’inversion de prénom est une procédure gracieuse et est à ce titre obligatoirement soumise pour avis au procureur de la République, qui peut donc s’y opposer même si c’est toujours le juge aux affaires familiales qui tranchera. La nouvelle loi maintiendra d’autant plus cette situation que le procureur aura déjà fait connaître son opposition avant même la saisine du juge aux affaires familiales. Mais il n’est pas exclu que le procureur se prononce différemment si des éléments ou des arguments plus probants lui sont soumis.
Faut-il avoir recours à un avocat pour un changement de prénom ?
Quel que soit le stade de la procédure, une demande de changement de prénom doit donc être soigneusement préparée pour avoir un maximum de chances d’aboutir. Même si le recours à un avocat n’est obligatoire qu’au dernier stade de la procédure, il peut être utile de se faire conseiller par un avocat avant de s’engager dans cette démarche.
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